Adrien Le Falher

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FRENCH - De la neige dans un désert

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On mesure la qualité d'un voyage, et donc de la vie, à sa capacité à nous surprendre.

Après deux mois assez exceptionnels à Kyoto, une des dix villes où il vaut la peine d'avoir vécu (dixit Nicolas Bouvier, 50 ans plus tard, je confirme), nous nous faisions la remarque, sur le chemin tentaculaire qui nous menait à Hiroshima, que la suite serait plus calme. C'est bien dans ces moments là que le meilleur se prépare à surgir.

Nous mîmes trois jours à atteindre Hiroshima, deux escales étant prévues sur la route.

En premier lieu, Kinosaki, une ville perchée dans les montagnes, au Nord de Kyoto. Connue pour ses onsen, ces bains thermaux typiquement japonais, elle nous promettait une pause agréable dans ce long voyage.

Le chemin, dans ce train minuscule, nous a conduit à travers la campagne japonaise, celle qu'on ne voit que rarement, parce que sans charme à qui ne serait le voir. Et pourtant… Dans ce défilement de petits villages, de rizières comme autant de jardins derrières ces maisons japonaises, une harmonie fugace ce forme. Tout se mélange, et on se laisse pénétrer par le charme tranquille de ces bourgades, à la fois exotiques et familières. Le train se vide, nous restons seuls dans le wagon.

Kinosaki nous accueille par un déluge de pluie qui ne cessera pas de la nuit. Vêtus de traditionnels yukata, ces kimonos de cotton léger habituellement portés pendant les festivals d'été, nous participons au jeu de la ville, la visite des sept onsen principaux. Nous en ferons quatre, se baignant tantôt dans une grotte, au pied de la montagne où le cours d'eau se jette directement dans le bassin, ou dans un jardin japonais.

Le lendemain matin, toute la ville est recouverte d'un manteau de neige qui ne cesse de s'épaissir. Un dernier bain naturellement bouillant nous réchauffe, avant de reprendre le train pour Tottori, où nous attendent des dunes de sable dont j'ai entendu parler quelques jours plus tôt.

 

 

Le train fend la neige et traverse les montagnes, découvrant entre les tunnels des maisons en bois au toit poudreux. La mer est déchainée et vient s'exploser contre la côte. Le paysage est dramatique, comme extra-terrestre. Nous restons hallucinés, le nez collé à la vitre, pendant tout le voyage.

L'arrivée à Tottori en revanche se fait sous un grand soleil, même s'il y fait très froid. Débarrassés de nos sacs, nous sautons dans le premier bus pour ce désert que me fait tant rêver. J'ai deux passions : les déserts et les îles, c'est dire si le lieu avait de quoi m'attirer !

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La météo nous a donné du fil à retordre : un froid qui nous a congelé, un vent terrible, qui nous donnait l'impression tour à tour de faire du sur place ou de nous envoler. Prendre des photos dans ces conditions était particulièrement difficile, mais l'occasion était trop belle… Mais si le temps ne nous était pas vraiment clément, le paysage devant nous dépassait nos espérances.

La montagne d'un côté, la mer de l'autre, et entre les deux, ces dunes, sculptées par le vent violent. Au-dessus de nous, un ciel menaçant, et par moment, le soleil, qui perçait les nuages.

Savoir gérer l'attente, surtout dans le monde d'aujourd'hui où tous les guides, les sites internets sont illustrés de magnifiques photos, toutes prises au bon moment, à la bonne saison, etc, est probablement un des plus gros défi du voyage. On ne traverse pas le Japon d'une côte à l'autre sans se dire qu'il n'y a rien à voir, mais l'attente est le premier ingrédient de la déception. Je pense que c'est aussi une des leçons de vie qu'il faudra garder de ce voyage : trouver l'énergie, la raison d'avancer, tout en acceptant le résultat, qu'il corresponde à nos espérances ou pas. Dans un métier comme le mien, où l'on passe son temps à monter des projets, à rêver des aventures, il me semble que c'est une leçon essentielle pour tenir ; savoir à la fois donner tout de soi à son projet, et vivre avec le résultat, en tirer quelque chose.


Après une nuit passée dans un manga café, étonnamment confortable, 10 centimètres de neige nous mouillent les jambes. Après le ciel couvert mais sec de la veille, une nouvelle visite du désert, sous la neige, s'imposait.

Le vent était toujours aussi pénétrant et glacial, mais le paysage avait changé. Le jaune du sable se mêlait avec le blanc de la neige, créant un paysage encore plus étranger, plus unique que la veille.

Les sillons de neige formaient des formes sinueuses, comme une rivière, qui disparaissait, se fondant littéralement dans le sable.

"On ne va jamais croire que je n'ai pas retouché mes photos !", dis-je à Cerise.

Mais le paysage était bien là : cette juxtaposition des éléments improbable, ces dunes bicolores, et toujours ce ciel, à moitié nuageux, qui éclairait le tout d'une lumière magnifique. Je laisse mes derniers mots à une image.

La galerie complète est visible ici.